Les remèdes des Pygmées sous nos latitudes

Vous me connaissez : j’ai pour habitude dans mes lettres de traiter d’une pathologie particulière ou de vanter les propriétés d’un produit, d’une plante ou d’un régime essentiel pour votre santé.

Pourtant aujourd’hui, j’ai souhaité aborder un sujet un peu différent.

Si vous me lisez c’est que vous faites confiance à la médecine naturelle et traditionnelle, mais je vais vous inviter à dépasser vos croyances et repousser les frontières…

…pour partir avec moi à la rencontre des rites et pratiques médicinaux venus de traditions ancestrales des quatre coins du globe.

J’aimerais en effet vous parler d’ethnomédecine et vous montrer en quoi nous avons tant à apprendre des peuples racines et de leurs pratiques, en harmonie avec notre Terre Mère !

Regard sur d’autres cultures : une alliance entre science et tradition

L’un des premiers attraits de l’ethnomédecine a tenu à son exotisme.

Elle nous a fait découvrir les modes de vie des Bushmen d’Afrique australe, des Aborigènes d’Australie, des Esquimaux ou des Papous…

Chez ces peuples, la médecine fait partie de la culture : elle est globale et intuitive, contrairement à notre conception fragmentée de la santé, inadaptée, parfois même inefficace…

Je ne vous apprends rien, vous êtes nombreux à en avoir fait les frais !

Quel abîme, en effet, entre notre conception de la maladie — réalité biologique avec sa cause ou son dysfonctionnement, sa chaîne épidémiologique ou ses facteurs de risques — et la réalité symbolique qu’elle peut revêtir dans d’autres sociétés…

Pourtant, et je crois que la plupart d’entre vous sera d’accord, la maladie n’est pas qu’une question biomédicale.

C’est dans cette optique qu’il convient peut-être de considérer le recours aux médecines naturelles et traditionnelles : non comme une opposition à la médecine scientifique, mais en tant qu’allié de celui-ci.

Nouvelle approche, l’ethnomédecine nous fait découvrir les éléments d’une pharmacopée élaborée, des actes sur le corps humain plus ou moins ritualisés, ainsi que des procédures de stimulation de la personnalité.

Certains d’entre vous seront sûrement sceptiques.

Pourtant ces pratiques existent depuis la nuit des temps.

Et si la médecine chinoise et ayurvédique ont déjà fait leur preuve dans certaines parties du globe, d’autres pratiques, moins connues, méritent également d’être étudiées. ..

Sans surprise, les laboratoires confirment les savoirs traditionnels

Depuis toujours, l’homme a su trouver dans son environnement les plantes utiles pour se nourrir et se soigner.

Ainsi, la plupart des principes actifs des médicaments modernes sont en réalité utilisés depuis la nuit des temps par les guérisseurs du monde entier.

Cela ne vous surprend sûrement pas, car personne n’ignore aujourd’hui la richesse et la diversité des plantes médicinales !

Et c’est pour cela qu’elles sont toujours utilisées par 80 % des habitants de notre planète qui ne se soignent que par les médecines traditionnelles de leur pays, que ce soit par choix ou par défaut d’accès aux médecines modernes.

Malgré leur scepticisme d’origine, la pertinence des indications thérapeutiques des remèdes traditionnels a fini par frapper les scientifiques occidentaux.

C’est pourquoi depuis la fin des années 80 une discipline, l’ethnopharmacologie, aborde l’étude des médecines traditionnelles et de leurs pharmacopées sous un éclairage nouveau.

Située à l’interface des sciences de l’homme (ethnologie, histoire, linguistique, archéologie) et des sciences de la nature (botanique, pharmacologie, chimie, pharmacognosie, clinique), cette discipline respecte la tradition et s’ouvre à l’innovation.

Schématiquement, la recherche se déroule en trois temps :

  • Dans un premier temps, un travail de terrain recense l’usage des plantes médicinales et des produits d’origine naturelle à travers le monde.
  • Ensuite, un travail de laboratoire vise à mieux comprendre et définir l’activité thérapeutique de ces substances grâce aux outils modernes de la recherche. L’expérimentation scientifique est en fait ici guidée par l’usage traditionnel.
  • Finalement, un travail de retour vers le terrain inclut des programmes de valorisation de la recherche par la promotion de médicaments à base de plantes efficaces et dépourvus de toxicité, ainsi que par la publication des travaux de recherche.

Et dans 75% des cas, les usages traditionnels sont confirmés par la médecine scientifique !

C’est par exemple ainsi qu’ont pu être démontrés :

  • Les propriétés anxiolytiques du pavot de Californie et de la passiflore
  • Les effets sédatifs de la mélisse
  • L’action anti-inflammatoire de la griffe du diable (harpagophyton), du marronnier d’Inde et de l’Euphorbe hérissée (grand remède antiamibien et antiasthmatique)
  • Les propriétés protectrices du foie du romarin, du boldo et de l’eupatoire
  • Les effets diurétiques du fenouil, de la busserole, de la piloselle et du sureau.

Aujourd’hui encore, parmi les milliers de plantes médicinales recensées, un grand nombre n’a pas attiré l’attention des chercheurs et de nombreuses potentialités thérapeutiques restent à découvrir.

L’OMS au secours de la médecine traditionnelle

Malheureusement, face à des perspectives de nouveaux traitements souvent très rentables, l’industrie pharmaceutique exploite ces ressources naturelles sans se soucier aucunement des conséquences.

C’est ainsi un pillage systématique qui s’opère et pose de nombreux problèmes :

  • Tout d’abord il devrait exister une obligation de partager les résultats des investigations avec les populations dont sont issues les plantes et les connaissances objets des enquêtes de terrain.
  • Une autre question est celle de la propriété de ces savoirs et du dépôt de brevets relatifs à l’exploitation des principes actifs de la plante, privant les peuples de leur patrimoine.
  • Enfin, la cueillette de plantes à grande échelle met en péril les biotopes lorsqu’elles sont systématiquement prélevées sans assurance préalable de la pérennité de l’espèce.

Face à ces menaces, de nombreuses initiatives de restitution du savoir, de valorisation des recherches ou de promotion de phytomédicaments issus des médecines traditionnelles ont été entreprises.

Les recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) vont dans ce sens.

Elle demande, en effet, aux pays en développement d’étudier leurs médecines traditionnelles et de promouvoir l’usage de plantes médicinales dans les programmes de santé.

Les États en question sont invités à intégrer, dans leurs politiques pharmaceutiques nationales, les médicaments traditionnels qui ont démontré leur efficacité et doivent élaborer un cadre réglementaire spécifique. C’est en quelque sorte de l’ethnopharmacologie appliquée.

Ainsi, en Afrique, chaque ministère de la santé réserve un département spécifique aux médecines traditionnelles.

Grâce à cette politique, j’ai pu publier de nombreux articles sur l’ethnomédecine dans la revue de l’OMS dont l’attention avait été attirée par la création de mon association, les « Médecins aux pieds nus » (comme en atteste la lettre ci-dessous), dont je voudrais vous parler maintenant.

Les Médecins aux pieds nus, sorciers des temps modernes !

Mon Organisation de solidarité internationale des « Médecins aux pieds nus » est un combat qui me tient à cœur depuis aujourd’hui plus de trente ans.

Qu’ils soient médecins, infirmiers, naturopathes… , ses membres interviennent dans le monde entier à la demande expresse des populations par l’intermédiaire de partenaires locaux.

Pour assurer leur formation en ethnomédecine et en phyto-aromathérapie, j’ai créé la Faculté libre de médecines naturelles et d’ethnomédecine à la Sorbonne.

Ces marabouts modernes sont actifs sur le front de la maladie et de la faim, mais également animés par la volonté de préserver la biodiversité végétale et animale.

Ainsi, ils créent des jardins botaniques de plantes médicinales capables d’enrayer les pathologies courantes comme le paludisme, l’amibiase, la drépanocytose et les nombreuses pathologies virales (dengue, fièvre hémorragique, hépatites, herpès…).

Depuis 1987, les volontaires des MAPN ont accompli de « petites choses » à travers le monde :

  • Ils ont par exemple cultivé une plante chinoise, l’Artemisia annua, dans des régions impaludées. Grâce aux préparations galéniques mises à la disposition des populations, la morbidité due au paludisme a chuté considérablement.
  • Pour contrecarrer la drépanocytose (pathologie génétique sanguine), une préparation à partir d’une plante locale (Fagora xanthoxyloïdes) a permis de rallonger significativement l’espérance de vie des enfants atteints.

En l’absence d’une aide suffisante des grands laboratoires pharmaceutiques, qui préfèrent regarder le profit quand l’humanité souffre, des centaines de MAPN ont parcouru les continents pour aider les populations en détresse grâce aux ressources locales.

C’est un combat de premier plan et je veux que vous sachiez que la porte de mon association est grande ouverte à celles et ceux d’entre vous qui caresseraient le projet de participer à une noble et belle aventure utile.

Si vous êtes passionnés par cette approche de l’ethnomédecine, un petit livre de 125 pages est en vente. Vous pouvez faire un chèque de 15 euros à mon nom ou les envoyer en espèce avec l’adresse à laquelle vous souhaiteriez vous le faire livrer (les frais de port sont compris). Adresser le courrier à l’association Médecins aux pieds nus, au 9 rue du général Beuret, 75015 Paris. Pour ceux qui peuvent se déplacer au bureau je vous le dédicacerai avec plaisir.

Couverture de mon ouvrage sur l’ethnomédecine

Par ailleurs vous pouvez vous rendre sur le site le site www.medecinsauxpiedsnus.com afin d’en savoir plus et aider si vous le souhaitez cette association qui recourt aux médecines naturelles et traditionnelles.

Une pharmacopée miraculeuse pour votre santé

1/ Le Baobab, couteau suisse de la nutrition

Arbre à palabre dans de nombreux villages à travers l’Afrique, l’ombre du baobab est le lieu de rassemblement où les habitants partagent sur leur vie quotidienne et où les enfants viennent écouter les contes.

Il entre également dans la pharmacopée traditionnelle sous toutes ses formes – racines, feuilles, pulpe du fruit, graines – à des fins thérapeutiques variées.

Son fruit, le « pain de singe », a de très nombreuses propriétés médicinales :

  • C’est une ressource antioxydante exceptionnelle : sa pulpe est six fois plus concentrée en vitamine C que les oranges et très riche en vitamines B1 et B2. Il est ainsi quatre fois plus efficace que le kiwi, dix fois plus que l’orange et quinze fois plus que la pomme.
  • Il restaure l’équilibre intestinal :
    • Ses fibres solubles favorisent le développement de la flore bactérienne (le microbiote) et remplacent avantageusement les prébiotiques industriels.
    • Ses fibres insolubles facilitent le transit intestinal et sont un remède efficace en cas de constipation.
    • Bien que cela puisse sembler contradictoire, c’est également un bon antidiarrhéique et  un excellent réhydratant de par sa concentration en tanins et en mucilages (substances végétales qui gonflent et deviennent visqueuses au contact de l’eau).
  • Son efficacité anti-inflammatoire le fait conseiller en cas d’arthrite et autres rhumatismes.  
  • Il a de fortes propriétés antalgiques, comparables à celles des molécules médicamenteuses de synthèses (aspirine, phénylbutazone…).
  • Enfin, c’est un fébrifuge (combat la fièvre) particulièrement efficace.

Et comme il s’agit d’un remède naturel, vous avez bien moins à craindre les effets secondaires qu’avec les médicaments « classiques » souvent pris en excès et sans que cela soit nécessaire !

Bien sûr, vous pouvez toujours planter un baobab dans votre jardin, mais il faudra attendre un certain temps avant de bénéficier de ses énormes fruits !

Aussi, inutile de grimper aux arbres : on le trouve en poudre dans les magasins bio, à mélanger à nos yaourts, mais aussi en barres de céréales, en gélules, en huile antirides et désormais en jus, issu du commerce équitable, dans la grande distribution.

2/ L’Euphorbe hérissée, une arme contre les maladies diarrhéiques 

Cette petite plante herbacée est très répandue dans la médecine traditionnelle d’Afrique équatoriale où les diarrhées, dues à la mauvaise qualité de la nourriture ou de l’eau, constituent une préoccupation sanitaire constante.

Appelée Mainommée dans l’Encyclopédie médicinale de l’Afrique des éditions Larousse, on la trouve en France sous son nom latin d’Euphorbia hirta.

Pour faire disparaître une amibiase ou une dysenterie amibienne, il suffit de faire bouillir 100 grammes de plante dans un litre d’eau et de boire cette décoction sur trois jours.  

C’est une excellente alternative à certains médicaments antiamibiens qui sont fréquemment très mal supportés par les malades (réactions cutanées, atteintes nerveuses, allergies…).

3/ Un fabuleux remède anti-drogue, l’Iboga

Cet arbuste aux fruits orange est surtout répandu au Gabon, en Guinée équatoriale, au Sud-Cameroun, au Congo-Brazzaville et à Madagascar où il est utilisé depuis des temps immémoriaux.

En thérapeutique, les écorces de racines produisent des effets stimulants dans les asthénies physiques et intellectuelles (fatigues) et dans les convalescences des maladies infectieuses.

Mais en grosse quantité, la racine d’Iboga est un hallucinogène dont l’emploi est réservé aux cérémonies d’initiation à diverses sociétés, au Gabon : le Bwiti chez les hommes, l’Ombuiri chez les femmes.

Ces propriétés ont servi à justifier sa classification comme stupéfiant en France, en Belgique et en Suisse, et donc à en interdire la détention et la consommation. 

Paradoxalement, depuis quelques années, les laboratoires (toujours prompts à décrier la médecine naturelle mais aussi prêts à l’exploiter jusqu’à la moëlle lorsque cela les arrange) s’intéressent à l’action antidrogue d’un alcaloïde présent dans cette plante, l’ibogaïne.

En effet, ce composé entrerait en interférence avec l’héroïne et la cocaïne sur les récepteurs concernés, faisant disparaître le besoin de produits stupéfiants.

L’Iboga serait également d’un grand secours chez les patients atteints de la maladie d’Alzheimer (voir mon livre sur Amazon : Alzheimer, la maladie décryptée).

Comme vous pouvez le constater, il y a beaucoup à gagner à s’inspirer des pharmacopées et médecines traditionnelles.

J’espère vous avoir intrigués et je vous encourage vivement à vous renseigner plus amplement sur ce passionnant sujet. 

Je serai bientôt de retour avec une nouvelle lettre pour le bien de votre santé mais en attendant, portez-vous bien !

Dr Jean-Pierre Willem

33 commentaires pour “Les remèdes des Pygmées sous nos latitudes

  1. Merci au Docteur J.P. WILLEM pour votre excellent travail
    sur nos corps par la prise de conscience de méthodes naturelles.
    Je diffuse vos coordonnées à mon frère et une voisine…
    Avec ma sympathie.
    B/FERLIN

  2. Cette etude des medecines locales est intéressante et tres pertinente pour les populations locales mais attention à l’exportation des resultats et produits ! Vous preparez le terrain, le risque est important: comment pourriez-vous être sûr que votre travail ne sera pas récupéré par l’industrie pharmaceutique au détriment des populations et par des cultures ou exploitations exagérées des ressources locales ? Sans compter les transports des produits de l’autre bout du monde. Chaque pays a ses ressources qu’il faut exploiter localement.

  3. Bonjour,
    Voyageant par auto-stop en Turquie, Iran et Afghanistan, et allant au Nepal en 1963, je faisais tres attention de boire des thes dans les cafes ou auberges, malheureusement j’ai succombe a Kabul en Septembre 63 a un vendeur de glace ambulant dans les rues. La consequence fut une dysenterie amibienne ou vous allez aux toilettes plus de 30 fois en 24 h, un anus qui resemble a un doigt de gant. A Kabul comme partout en Asie du Sud, lorsqu’on a une telle diaree ou des bulles on se soigne avec l’ecume de la cuisson du riz complet que l’on boit ensuite tous les 2 ou 3 heures et cela reussit en 2 ou 3 jours a reduire et a arreter votre dysenterie et vos maux de ventre.

  4. Bonjour ! Je suis un médecin Suisse, félicitations pour votre livre et l’intro de ce jour à l’ethnomédecine !
    Pour acheter le livre, n’y a t’il pas un lien direct avec paiement sécurisé, en Suisse les chèques sont très peu usités . Merci !!

  5. Merveilleuse nature…
    Et cerveaux formidables pour rechercher les bienfaits de ce qui pousse autour de nous..

    TOUT est là..

    Merci de le faire partager.

  6. Merci de vos informations très intéressantes et de votre façon de les présenter.
    Pour le baobab – ou peut-on l’acheter?
    Bonne continuation
    Janka

  7. Bonjour Dr Willem,
    Je suis d’accord les peuples racines ont tout à nous apprendre. Ils savent depuis toujours soigner les 3 corps et ce dans les respect du vivant et de l’Univers qui nous entoure. Ils sont humbles et humains.
    Merci pour vos lettres toujours très passionnantes.
    “Si c’est pour mon plus grand bien et pour le bien de toutes vies, en tous lieux, apprennez moi”. Merci merci merci !
    Sylvie

  8. Je continue. Donc merci finalement pour vos recherches tous azimuts à vous et toute l’équipe. On est un peu trop souvent sollicités c’est vrai. Mais il y a de vrais conseils utiles avant de passer à la caisse. D’ailleurs j’ai voulu m’inscrire à l’une des revues j’ai oublié laquelle, jamais réussi. Jamais reçu les livres internet gratuits.
    Bref, bravo pour l’idée des Médecins aux pieds nus. Mais faire blocus à BIG PHARMA etc.. est d’une urgence capitale.

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